Par Me Marianne Dessureault
Vous avez des problèmes d’audition et votre médecin vous a récemment diagnostiqué une surdité neurosensorielle bilatérale ou autre trouble de la même famille? Vous êtes convaincu qu’un emploi précédent ou que votre emploi actuel est la source de cette maladie? La CNESST peut reconnaître votre atteinte auditive comme une lésion professionnelle indemnisable et, plus particulièrement, comme une maladie professionnelle. Il est possible que ce soit relié au travail? Faites une réclamation à la CNESST.
La Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles (ci-après la Loi) prévoit plus précisément une présomption facilitant la reconnaissance du trouble d’audition comme une maladie professionnelle. Trois critères doivent alors être démontrés : (1) qu’il y a atteinte auditive (diagnostic de surdité ou autre), (2) que cette atteinte auditive est causée par le bruit et (3) que le travail exercé implique une exposition à des bruits excessifs[1].
Mais qu’en est-il pratiquement? Qu’entend-on exactement par ces critères?
Atteinte auditive causée par le bruit
Le Tribunal administratif du Travail (auparavant Commission des lésions professionnelles) tend à reconnaître qu’une atteinte auditive causée par le bruit se caractérise généralement par un audiogramme démontrant une chute évidente du seuil d’audition dans les fréquences de 4000 Hz et une remontée ensuite dans les fréquences de 6000 et 8000 Hz[2], bien que le Tribunal peut accepter une réclamation dont la courbe de l’audiogramme diffère si des motifs le justifient.
Sur le plan médical, une atteinte auditive causée par le bruit se traduit souvent par un diagnostic de surdité neurosensorielle bilatérale.
Bruits excessifs ou nocifs au sein du milieu de travail
La Loi ne définit pas la notion de bruit excessif. Par conséquent, les tribunaux retiennent le sens commun du terme, c’est-à-dire un bruit qui dépasse la normalité, qui dépasse la mesure souhaitable ou permise ou qui est exagéré[3]. Ainsi, pour déterminer une telle mesure et juger si l’exposition a été significative, ils considèrent, entre autres, les critères d’intensité et de durée d’exposition. À cette étape, il est notamment possible de comparer avec les seuils établis par les divers règlements en matière de santé et sécurité au travail ou se référer à une étude de bruit effectuée.
À titre d’exemples, on peut penser à des emplois nécessitant l’utilisation ou à proximité de machines industrielles ou de scies : ouvrier d’usine, foreur de puits, couturier en usine, bûcheron ou même responsable à la réception des marchandises.
Enfin, dans un cas où l’atteinte auditive n’est pas causée par le bruit ou si l’un des critères précédemment énoncé n’est pas respecté, il y a tout de même moyen d’obtenir la reconnaissance de la CNESST pour la maladie en démontrant qu’il s’agit d’une conséquence directe du travail exercé ou d’un travail exercé par le passé ou en lien avec les risques de ce travail[4]. Par exemple, la maladie peut être la conséquence des bruits présents dans le milieu de travail, bien que les bruits ne soient pas excessifs ou être l’aggravation d’une maladie préexistante en raison d’un élément au travail.
En résumé, si vous avez travaillé dans un milieu où le niveau sonore est élevé – un bon indice est que vous devez parler plus fort pour vous faire comprendre – et que vous avez reçu un diagnostic de surdité neurosensorielle bilatérale, vous rencontrez fort probablement les critères de la Loi pour une maladie professionnelle.
L’information contenue dans cette infolettre peut être de nature juridique, mais ne constitue pas un avis juridique.
[1] Art. 29 et annexe I, section IV L.a.t.m.p.
[2] Éthier et Carrière Lagacé, (1997) C.A.L.P. 1282 ; Moulage Sous Pression AMT inc. et Compagnie minière IOC et al., 2014 QCCLP 7030 ; Morin 2013 QCCLP 1165
[3] Thuot et Multi-Marques Distribution inc., (2001) C.L.P. 144647-61-0008
[4] Art. 30 L.a.t.m.p.