Me Marianne Dessureault, Journal le Métro, 11 avril 2018
Dans les dernières semaines, il a été question du partage de données personnelles à des organismes via la plateforme de Facebook. Cette cueillette d’informations privées n’est sans doute pas sans rappeler certaines histoires de travailleurs ou accidentés qui se sont vus refuser des indemnités suivant les conclusions d’une enquête ou filature menée. Mais jusqu’où la SAAQ, la CNESST et un employeur peuvent-ils aller tout en respectant le droit à la vie privée ?
Tant au niveau de la CNESST que de la SAAQ, la surveillance peut être admise si elle est basée sur des motifs rationnels et opérée par des moyens raisonnables. Aussi, des informations recueillies sur un réseau social comme Facebook sont autorisées si ces informations ou photos sont publiques (sans restriction de confidentialité).
La Cour d’appel du Québec a établi les principes applicables dans l’affaire Bridgestone/Firestone. Un enquêteur avait filmé le travailleur alors qu’il effectuait des activités physiques incompatibles avec son état de santé rapporté : le transport d’une chaudière de chlore de piscine de poids moyen et courir sur une courte distance. Il ne s’agissait-là probablement que de moments pourtant peu fréquents et faits de manière exceptionnelle.
Ainsi, pour avoir le droit de recourir à la surveillance, l’employeur ou l’organisme ne peut pas simplement opter pour ce moyen arbitrairement et au hasard. Il doit exister des motifs raisonnables AVANT de décider de mettre une personne sous surveillance. De plus, au niveau des moyens utilisés, il faut que la mesure de surveillance, notamment la filature, soit nécessaire pour la vérification du comportement du travailleur et menée de la façon la moins intrusive possible. L’exécution de la surveillance doit aussi éviter des mesures qui porteraient atteinte à la dignité d’un travailleur. Un exemple d’intervention abusive pourrait être un cas où un travailleur est filmé dans la chambre à coucher de son domicile.
Avec la saison estivale qui frappe (timidement) à nos portes, il devient tentant de sortir davantage, de faire plus d’activités et surtout de publier de nouvelles photos sur les réseaux sociaux. Sans vous en empêcher, assurez-vous toujours d’être cohérents entre vos limitations et vos activités quotidiennes. Faites preuve de discrétion et questionnez-vous avant de publier des égoportraits géolocalisés.
Dans le doute, informez-vous !