En 2010, la Commission des lésions professionnelles (CLP) a jugé que la réduction de l’indemnité de remplacement du revenu des travailleurs blessés à l’âge de 65 ans constituait une forme de discrimination interdite par les Chartes canadienne et québécoise des droits et libertés.
En révision judiciaire, la Cour supérieure du Québec a renversé cette décision de la CLP. En 2012, la Cour d’appel du Québec a confirmé que cette réduction prévue par la loi n’est pas discriminatoire.
L’article 56 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles (la Loi) stipule que l’indemnité de remplacement du revenu est réduite de 25 % à compter de l’âge de 65 ans, de 50 % à 66 ans, et de 75 % à 67 ans. La décision de la CLP énonçait que cette réduction de l’indemnité fondée sur l’âge était discriminatoire en vertu des termes de l’article 15(1) de la Charte canadienne des droits et libertés, et de l’article 10 de la Charte québécoise des droits et libertés de la personne. Selon la CLP, cette forme de discrimination fondée uniquement sur l’âge n’était pas justifiable en vertu de l’article premier de la Charte canadienne.
Le gouvernement du Québec soutenait que l’article 10 de la Charte québécoise des droits et libertés de la personne autorise la discrimination fondée sur l’âge. Par conséquent, le Procureur général du Québec demanda une révision judiciaire devant la Cour supérieure.
La Cour supérieure explique que toutes les distinctions fondées sur l’âge ne sont pas nécessairement attentatoires. En 2009, la Cour suprême du Canada a jugé que pour alléguer la discrimination en vertu de l’article 15(1) de la Charte canadienne, une personne doit non seulement prouver que la loi crée une distinction fondée sur des motifs énumérés ou analogues, mais aussi qu’une telle distinction crée un désavantage en perpétuant un préjudice ou un stéréotype. De plus, la Cour supérieure nous informe que les distinctions fondées sur l’âge sont fréquentes dans notre société. Il est essentiel de tenir compte du contexte global de la distinction en question.
La Cour supérieure soutient également que dans la plupart des cas, les travailleurs ayant atteint l’âge de 65 ans sont à la retraite, et possèdent des sources de revenu auxquelles n’ont pas droit les plus jeunes. Si l’on tient compte de toutes les prestations sociales disponibles, les travailleurs plus âgés ne subissent pas de préjudice suite à la réduction de leur indemnité de remplacement de revenu conformément à la Loi. Si cette distinction fondée sur l’âge n’était pas prévue dans la Loi, les travailleurs accidentés âgés de 65 ans ou plus auraient droit à la même indemnité de remplacement de revenu que les plus jeunes, en plus des prestations sociales auxquelles ils ont droit à compter de cet âge. De plus, la Cour supérieure juge que la formulation de l’article 10 est claire et non ambiguë. Toute forme de distinction, exclusion ou préférence fondée sur l’âge est interdite, sauf conformément à la loi.
Récemment, la Cour d’appel du Québec a fermé ce chapitre en énonçant qu’il n’a pas été démontré que la Loi est discriminatoire. La Cour d’appel est aussi d’avis que la Loi ne prive pas les personnes âgées des avantages accordés aux autres bénéficiaires du régime d’indemnisation.
En somme, la distinction stipulée à l’article 56 de la Loi respecte le cadre des Chartes canadienne et québécoise des droits et libertés, et par conséquent, ne peut être jugée discriminatoire.
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