Premièrement, la Charte québécoise des droits et libertés de la personne prévoit à l’article 46, que «Toute personne qui travaille a droit, conformément à la loi, à des conditions de travail justes et raisonnables et qui respectent sa santé, sa sécurité et son intégrité physique». Protection incluse dans une loi de ci-haute envergure nous démontre l’importance qu’on accorde à protéger les travailleurs dans leur milieu de travail. De plus, le Code civil du Québec prévoit à l’article 2087, les obligations auxquelles un employeur est tenu envers ses employés et cela implique la responsabilité de prendre toutes les mesures appropriées à la nature du travail, en vue de protéger la santé, la sécurité et la dignité.

Plus particulièrement, la Loi sur les normes du travail, à l’article 81.18, indique les critères nécessaires pour être en mesure d’établir une situation qui correspondrait à du harcèlement psychologique. On parle alors d’une conduite vexatoire qui se manifeste par des comportements, des paroles, des actes ou des gestes répétés, qui sont hostiles ou non désirés et qui porte atteinte à la dignité ou à l’intégrité psychologique ou physique du salarié et qui entraîne, pour le travailleur, un milieu de travail néfaste.

Il faut donc démontrer la présence d’une conduite vexatoire et ce, par la nature même du geste, le niveau de gravité, la fréquence des événements et on prendra en considération les conséquences que cette dernière a eu sur non seulement la santé psychologique d’une personne mais bien sur sa santé physique. Une personne peut n’avoir aucune intention de nuire à autrui et elle peut considérer ses paroles ou gestes comme étant inoffensifs ou bénins mais cela n’a aucune importance du fait que l’on se place dans les souliers de la victime et que l’on regarde si cette dernière pouvait se sentir vexée par la conduite reprochée.

Les gestes doivent dénoter un caractère de répétition, c’est-à-dire que l’on doit retrouver une succession d’événements sur une période de temps. Ces gestes, pour être considérés hostiles ou non désirés, doivent créer un milieu de travail malsain pour la victime d’harcèlement et ne doivent pas être absolument graves. En effet, plusieurs petites situations peuvent être assimilées, lorsqu’elles sont regroupées, comme étant du harcèlement et la victime ne doit pas nécessairement faire part à son harceleur qu’elle n’accepte pas les agissements de ce dernier. Exiger à une victime de confronter l’harceleur pour faire reconnaître une situation d’harcèlement viendrait pénaliser celui qui se plaint et irait à l’encontre de l’esprit même de la loi. Ce qui est reproché à celui qui harcèle le travailleur doit constituer une atteinte à la dignité ou à l’intégrité physique ou psychologique de la personne sujette au comportement de ce dernier. On peut alors parler d’une baisse d’estime de soi, un sentiment de dévalorisation ou de blessures physiques.

La loi prévoit aussi qu’une seule situation peut être considérée comme une conduite grave et mener à du harcèlement lorsque la gravité du geste le permet.

Les salariés au sens de la loi, qui ne sont pas syndiqués se basent sur cet article lorsqu’ils sont victime d’un harcèlement psychologique et ceux qui le sont, peuvent quand même se prévaloir de cette disposition malgré qu’aucune règle à cet effet n’est prévue dans leur convention collective. Effectivement, cette disposition est réputée faire partie intégrante de toute convention collective et sert de protection minimale.

Les tribunaux auront recours au critère de la personne raisonnable, qui consiste à savoir si une personne objective et bien informée de toutes les circonstances et placée dans une situation semblable que celle du salarié conclurait à du harcèlement. Le travailleur a droit à un milieu de travail exempt de harcèlement psychologique et l’employeur a l’obligation de prendre tous les moyens nécessaires pour prévenir une telle conduite et de faire en sorte qu’elle cesse lorsqu’il en a connaissance.

Malgré que cette définition se retrouve dans la législation, elle ne signifie pas une indemnisation automatique par la Commission de la santé et sécurité du travail. En effet, la Commission des lésions professionnelles est venue confirmer à maintes reprises, qu’une personne victime de harcèlement psychologique doit avoir subi une lésion professionnelle au sens de la Loi sur les accidents de travail et maladies professionnelles, pour être en mesure de bénéficier de la protection prévue par cette loi.

Il est important de comprendre que le tribunal peut se servir de la définition retenue par la Loi sur les normes du travail mais il n’a pas pour objectif de statuer si effectivement on est en présence d’un harcèlement psychologique mais bien si de manière prépondérante, le travailleur a démontré la survenance d’un ou plusieurs événements imprévus et soudains, par le fait ou à l’occasion du travail et l’existence d’un lien de causalité entre le ou les événements et la maladie diagnostiquée.

Les événements devront dépasser le cadre normal et prévisible de travail et être démontrés de manière objective. Il faut souligner que l’on peut être en présence d’un événement imprévu et soudain par le biais de la théorie de l’accumulation des événements qui consiste à être une série d’événements qui peuvent sembler anodins lorsqu’ils sont pris isolément mais qui deviennent significatifs lorsqu’ils sont superposés. Ils devront aussi posséder objectivement un caractère traumatique sur le plan psychique.

Les gestes et paroles de clients, de collègues de travail ou bien les commentaires ou représailles de supérieurs pourront causer une problématique psychologique éventuelle. Il est donc important que toute personne victime de situations méprisantes sur les lieux de travail dénonce le tout à des personnes ressources au sein de l’organisation et si cette situation engendre des problèmes de santé, il est préférable de consulter un médecin dans les plus brefs délais pour qu’un suivi adéquat soit débuté.

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