Le régime de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles (ci-après la «Loi») prévoit la réparation des lésions professionnelles et ce, sans égard à la responsabilité de chacun. Il est prévu dans cette Loi qu’en cas d’impossibilité de travailler due à une lésion professionnelle, l’indemnité de remplacement de revenu sera de 90% du revenu net du travailleur.
Est-il possible pour le travailleur ayant subi une lésion professionnelle d’intenter une poursuite en responsabilité civile contre son employeur ou un coemployé? Dans la Loi, il a été prévu d’accorder une immunité civile à l’employeur et au coemployé (art 448 et suivants).
La Cour suprême du Canada, dans l’affaire Béliveau St-Jacques en 1996, a rejeté une requête afin d’obtenir des dommages-intérêts exemplaires contre l’employeur et le coemployé du travailleur en vertu de la Charte des droits et libertés de la personne. La Cour indique que l’immunité prévue dans la Loi a une portée très large. Les évènements constitutifs de la lésion professionnelle sont le point d’ancrage du recours en dommages exemplaires et compensatoires de l’article 49 de la Charte. Le recours fondé en vertu de la Charte réfère aux principes de la responsabilité civile et à l’imputation d’une faute. La Cour vient donc dire qu’en permettant ce type de recours, cela remettrait en question l’immunité accordée à l’employeur dans la Loi.
Suite à la décision de la Cour suprême ainsi qu’à d’autres décisions ayant suivi en la matière, la Cour d’appel du Québec en 2009 a eu l’occasion de rappeler les différents principes applicables quant à l’immunité accordée à l’employeur en vertu de l’article 438 dans l’affaire Ghanouchi c. Lapointe. La Cour d’appel réitère que même si une victime décide ou non de recourir à l’indemnisation prévue en vertu de la Loi, cela n’affecte pas l’immunité civile de l’employeur et du coemployé. Il est également accepté que même si la législation particulière n’offre pas de compensation, l’immunité civile de l’employeur et du coemployé s’applique.
Pour reprendre les propos de la Cour d’appel, l’immunité prévue à la Loi s’applique lorsque se produit un accident de travail entrainant ainsi une lésion professionnelle ET que le recours vise à réparer un préjudice, qui doit être autre que l’atteinte à la réputation.
Par ailleurs, l’article 441 de la Loi permet à un travailleur ayant subi une telle lésion de poursuivre un tiers en responsabilité civile dans quatre (4) situations bien précises : que le tiers a commis un acte criminel, pour recouvrer l’excédent de la parte subie sur la prestation, si le tiers est responsable de la lésion professionnelle ou que le tiers est tenu personnellement au paiement des prestations.
Par conséquent, dans certains cas précis, le travailleur aura un recours contre un tiers, mais de manière générale, l’employeur de celui-ci ne peut être poursuivi en responsabilité civile.
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