Lorsqu’une lésion professionnelle survient, l’indemnité de remplacement du revenu sert à compenser la perte salariale de la personne accidentée qui devient incapable d’exercer son emploi. Le montant des versements de cette indemnité se calcule en fonction du salaire annuel du travailleur. Plusieurs articles de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles (ci-après « la Loi ») portent sur la manière de déterminer la base salariale de l’indemnité de remplacement du revenu. Cependant, la question de la base salariale en est une qui soulève plusieurs contestations de la part des travailleurs.

L’article 71 de la Loi prévoit comment calculer la base salariale du travailleur qui occupe plus d’un emploi. En vertu de cette disposition, c’est uniquement le revenu de l’emploi le plus rémunérateur qui est retenu et la base salariale est calculée comme si le travailleur exerçait cet emploi à temps plein. Selon la jurisprudence actuelle cet article de la Loi semble dorénavant réservé aux travailleurs cumulant deux emplois à temps partiel.

Il existe cependant une controverse quant à la manière de calculer la base salariale d’un travailleur cumulant un emploi à temps plein et un emploi à temps partiel. Ces travailleurs sont désavantagés par l’application de l’article 71 de la Loi. En effet, le revenu estimé en application de cette disposition est nettement inférieur aux gains réels de ces travailleurs, puisqu’on ne tient pas compte du revenu tiré des deux emplois. Leur indemnité de remplacement du revenu s’en trouve donc diminuée et elle ne représente pas leur réalité financière.

Antérieurement, plusieurs décisions de la Commission des lésions professionnelles faisaient abstraction du salaire réellement gagné par le travailleur, en affirmant que le législateur a consciemment choisi un calcul différent pour ceux qui cumulent deux emplois. Or, le marché du travail a évolué depuis l’adoption de la Loi et le cumul d’emplois est de plus en plus courant. Afin d’éviter les iniquités, le courant jurisprudentiel majoritaire actuel considère qu’il faut plutôt interpréter la Loi de manière à respecter son objet, soit la réparation des lésions professionnelles. Dans ce contexte, la Cour d’appel a indiqué que pour établir la base salariale d’un travailleur accidenté, le revenu annuel retenu doit refléter sa réalité financière au moment de la survenance de la lésion.

Récemment, la Commission des lésions professionnelles a donc tendance à conclure que l’article 71 ne trouve pas application lorsqu’une personne travaille à temps plein chez un employeur et à temps partiel pour un autre employeur. Elle considère qu’il s’agit d’une situation particulière donnant ouverture à l’application de l’article 75 de la Loi.

En vertu de l’article 75 de la Loi :

75. Le revenu brut d’un travailleur peut être déterminé d’une manière autre que celle que prévoient les articles 67 à 74, si cela peut être plus équitable en raison de la nature particulière du travail de ce travailleur.

Concrètement, lorsqu’un travailleur cumule un emploi à temps plein et un emploi à temps partiel, le tribunal détermine la base salariale de l’indemnité de remplacement du revenu en cumulant le revenu des deux emplois. Le total du revenu brut retenu ne peut toutefois pas dépasser le maximum annuel assurable. Cette solution permet de compenser plus fidèlement la perte salariale du travailleur.

En d’autres mots, rappelez-vous que la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles vise à avantager les travailleurs et non à les pénaliser. Si vous cumulez plusieurs emplois, demandez-vous si la base salariale retenue par la CSST se rapproche de votre revenu gagné.

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