C’est une des questions les plus fréquemment posées lors de nos consultations. Effectivement, un travailleur victime d’un accident de travail peut avoir droit, s’il demeure avec une atteinte permanente, à une indemnité pour préjudice corporel. Ce préjudice tient compte du déficit anatamo-physiologique (DAP), du préjudice esthétique (PE), des douleurs et de la perte de jouissance de la vie (DPJV). ( Article 83 L.A.T.M.P) .
Lorsqu’il est temps de faire l’évaluation de l’atteinte permanente, le médecin doit se référer au Règlement sur le barème des dommages corporels (1987) 119 G.O. ll, 5576. Il y est indiqué qu’une entorse lombaire avec séquelles fonctionnelles objectivées s’évalue par un DAP de 2%. Dans ce 2%, le barème tiendrait compte des ankyloses (des limitations de mouvements) soit des lésions traumatiques des tissus mous ainsi que du syndrome facettaire s’il y a lieu.
Dans le cadre de notre pratique, les gens qui nous consultent sont déçus par ce maigre 2% qui leur est alloué, alors que leur problème lombaire a changé leur vie et qu’ils doivent vivre avec des douleurs intolérables. « Comment peut-on me donner 2% alors que j’ai l’impression d’avoir perdu 75% de mes capacités !»
Souvent l’entorse lombaire a des conséquences énormes pour ne pas dire démesurées, elle crée un handicap majeur, probablement qu’elle aura rendu symptomatique une condition qui était asymptomatique et peut-être même inconnue. Dans notre jargon légal, cela veut dire que l’investigation médicale entourant la prise en charge pour une blessure au travail, démontrera une condition personnelle préexistante et souvent insoupçonnée. Effectivement, la résonance magnétique dévoilera, par exemple, que le travailleur est porteur de hernies à chaque région lombaire (de L1 à L5). Il est improbable que l’accident ait causé 5 hernies d’un coup, toutefois, il est fort possible que l’accident, par un mécanisme d’entorse, ait rendu symptomatique la région lombaire. Le diagnostic à poser devrait donc être par exemple : entorse lombaire ayant aggravé une discopathie multiétagée. La discopathie ou la maladie d’un disque ou de plusieurs disques intervertébraux est devenue alors symptomatique par le fait de l’entorse découlant de l’accident de travail.
Cette aggravation pourra causer des limitations au niveau des mouvements (flexion, extension, rotation etc.), des douleurs irradiant dans les jambes (une atteinte nerveuse ou motrice comme la radiculopathie) et autres problèmes qui auraient été indemnisés si le diagnostic avait été celui de hernie par exemple.
Selon le barème utilisé par la CSST, la seule évaluation possible est un DAP de 2% peu importe les conséquences. Heureusement pour les travailleurs, il semble y avoir un changement dans l’interprétation du barème. Quelques décisions rendues par la Commission des lésions professionnelles ouvrent la porte à une plus grande indemnisation. Une juge administrative dans la cause Lapointe et Entreprises Blanchette et Hamelin inc. établissait dans son jugement qu’une entorse lombaire ayant aggravé une discopathie multiétagée ne peut être indemnisée uniquement par une atteinte de 2% puisque les séquelles sont plus handicapantes que celles reconnues pour une entorse lombaire. Ce raisonnement a été également repris, à notre connaissance, dans un autre jugement rendu par la CLP Laurentides. Alors, ne désespérez pas, avec un peu de persévérance et d’insistance, une entorse lombaire avec de graves conséquences pourrait être indemnisée à sa juste valeur !
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